Grêle aux Abrets et autres calamités

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les saisons de nos ancêtres

Nos aïeux dauphinois sont en partie figés lorsqu'ils entrent dans nos arbres généalogiques qui sont leur Panthéon. Mais, dans la vraie vie, il faisait chaud, il faisait froid, le vent desséchait les récoltes d'Aoste et de Chimilin, l'orage couchait les blés à Romagnieu ou aux Abrets, le Guiers impétueux innondait les pré communaux à Pont-de-Beauvoisin quand le massif des Chartreuses était trop arrosé.

Les années exceptionnelles sont décrites par suffisamment de curés, dans les registres paroissiaux. Même des décennies plus tard, d'autres prêtres, titulaires des cures dauphinoises, pouvaient comparer des calamitées entre elles. L'année 1684 fut très mémorable par son hiver glacial suivi de l'été brûlant 1685. En 1790 les curés restaient en mesure de dire que l'hiver 1789 fut terrible, mais pas tout à fait autant que celui de 1684, durant lequel la mer a gelé loin au large de la Normandie. Les fleuves de France étaient gelés à cœur. En Bas Dauphiné et Pays du Guiers, nos ancêtres n'ont pas échappé à ces calamités.

À la faveur de nos recherches généalogiques, posons notre loupe sur un événement bien plus restreint, au berceau de nos ancêtres, un épisode comme chaque été pouvait en apporter de temps en temps. Le 28 juin 1690 et le 1er juillet, la grêle se déchaîne sur la communauté des Abrets. Tout le monde sera sur le pied de guerre pour accélérer l'expertise des dommages.


Grêle aux Abrets, tous aux abris

Nous Messire François Robin, prêtre et curé des Abrets, André Poncin, notaire royal de la Bâtie de Divisin Recoing, et châtelain desdits Abrets, Louis Gueyraud Dureal, notaire royal et greffier dudit lieu, sur la réquisition de Sieur Modeste Novel, consul moderne du susdit lieu, pour procéder à la vérification du dommage causé sur les fruitiers et prairies de ladite communauté par la grêle qui y serait tombée sur le vingt huitième juin dernier et le premier du présent mois suivant.

Ladite verbal donné à nous curé par Monsieur Debasset, subdélégué de Monseigneur l'Intendant en cette province. Avons pris et nommés pour experts d'office pour nous y assister Sieur Charles Pain châtelain de Charencieu, Maître Pierre Pégoud notaire royal de Faverges (Faverges-de-la-Tour) habitant à Pressins, et Sieur Guillaume Dompnier, bourgeois du Pont de Beauvoisin…

consul moderne en Dauphiné Le consul moderne des Abrets est le consul en titre. Consul ancien ou consul vieux est celui qui a déjà exercé la charge dans cette communauté. Il est un des électeurs du consul en titre, le fameux consul moderne. Le consul qui achève son mandat maximal est inéligible durant une période fixée. Pour le scrutin, il est alors dit consul dormant. Puis, à l'issue de la période de dormance, il sera à nouveau éligible, sur proposition des consuls. Il doit y avoir deux personnes proposées par proposant. Ces impétrants sont d'abord ballotées avant le scrutin définitif. Souvent receveur des tailles royales péréquées, son rôle est à la fois honorable, mais délicat. En l'espèce, c'est si vrai qu'en 1700, 10 ans après la grêle, les Abrets ne s'en sont pas remis, la taille ne rentre pas bien. L'intendant envoie la troupe aux Abrets pour faire recouvrer, au besoin par la force, toute la taille royale.

On notera l'usage du toponyme concernant Recoing. Pour nos ancêtres vivant dans ce petit coin de la Valdaine en Dauphiné, il ne s'agit pas de Recoing à la Bâtie-Divisin, mais de la Bâtie à Divisin Recoing.


Expertise judicieuse en Bas Dauphiné

Prestation de serment. …desquels nous avons pris et reçu serment qu'ils ont à ces fins prêté par devant nous chacun, en levant la main aux formes ordinaires. Ce fait, nous nous sommes tous ensemblement transportés sur tous les fonds de ladite communauté et avons reconnu par l'exacte vérification que lesdits experts en ont fait, ainsi qu'ils nous rapportent que…

Les trois quarts des revenus de ladite communauté consistent en chanvre, grains et légumes, et le surplus aux fruits des arbres, noyers, pommiers, poiriers, châtaigniers, et vignes basses et en hauteur, et en quelque peu de foins.

écologie productive en Dauphiné La pratique écologique et productive de la vigne basse. Le sol absorbe la chaleur diurne, rediffusée durant la nuit au vignoble. Une vigne basse va optimiser ce phénomène thermique. Selon l'apport au sol, on va aussi gagner en journée. Avec des cailloux assez clairs, ceux-ci vont réfléchir les rayons du soleil vers les grappes durant le jour. La vigne, réchauffée nuit et jour, mûrit bien. Rappelons que l'ennemi du vin de nos ancêtres dauphinois était son assez faible titre alcoolique ; mieux les raisins mûrissaient, plus longtemps nos aïeux du Bas-Dauphiné conservaient leur vin, plus titré en alcool.

La vigne en hauteur sert un autre propos. Le but premier est potager, la parcelle est dévolue aux légumes. Mais on la plante en vignes pour qu'elle ne soit jamais dénudée. Il faut alors que la vigne soit haute. Les raisins seront moins murs à point, mais procureront cependant un surplus de récolte. Ces deux aspects sont l'apange d'une culture écologique intégrée et optimisée.


Les suites de la grêle aux Abrets en Dauphiné

Laquelle grêle battit et tomba avec tant de violence les susdits deux jours qu'elle a péri et gâté la moitié des fruits, des grains, légumes, des vignes, des arbres, et entièrement les chanvriers, à la réserve de ce qu'il peut rester des chanvriers où l'on estime, qu'avec l'aide de Dieu, il y pourrait avoir quelque peu de graines.

Les prairies sont tellement battues et meurtries que les pailles d'ailleurs sont tellement moulinées qu'on aura beaucoup de peine pour les pouvoir ramasser et que quantité de pailles ne pourront servir à autre usage que pour faire litière.


Vers une exemption de taille royale aux Abrets

Un curé dauphinois, deux notaires royaux des Abrets et de La Bâtie-Divisin, le capitaine châtelain de Charencieu, le notaire royal de Faverges-de-la-Tour, moult sommités des pays du Guiers, tout cela s'explique. La question cruciale pour l'ensemble de la communauté des villages de la paroisse des Abrets, et pour les moins riches plus cruciale, l'exemption de taille royale, espérée sur plusieurs années.

Et que à l'égard des fruitiers, des arbres et vignes qui composent partie du revenu dudit mandement, leurs propriétaires en seront privés non seulement cette année mais quelques années à venir ce qui mettra les habitants de ladite communauté hors d'état de pouvoir payer leurs charges.

En foi de quoi lesdits experts se sont soussignés avec nous et ledit consul audit lieu des Abrets, ce neuvième juillet mil six cent quatre vingt et dix.

Pour donner plus de poids à ce constat, à tout seigneur tout honneur. Signatures. Dhieres seigneur de Charancieu, Revol Demonchenu, Guillaume Gondras, Sr Estienne Dechaboud, Robin curé des Abrets, Pain expert, Pégoud expert, Dompnier expert, Novel, Bergier, Poncin, Gueyraud Dureal greffier.


Les registres paroissiaux des Abrets en pâtissent

Le registre paroissial des Abrets couvrant les années 1687 à 1691, reste conservé aux Archives Départementales de l'Isère. On peut le consulter sur le site Internet. Une interruption d'enregistrement des actes est constatée du 20 juin à mi-septembre. Par chance, cela se trouve sur une seule page, et la reprise est continue sans trous apparents. Ainsi est-on assuré que cela n'est pas une perte de documents, par l'injure du temps, mais bien la cessation de l'enregistrement par le curé des Abrets, qui ne complètera jamais plus les lacunes. Tout le monde était sur le pied de guerre après cette grêle, et seules ses conséquences occupaient les esprits et actes des paroissiens du mandement des Abrets.


Des noyaux de Charancieu

Ce Dhières (d'Hières Dhyères) Seigneur de Charancieu dont la signature apparaît la première à la suite du rapport d'expertise, est sans doute François Dhières, né en 1619, fils de noble François D'hyeres, Seigneur de Charancieu et de Thuellin, et de Laurence de la Poype. Il est donc celui-là même qui, à l'âge de douze ans, le 11 août 1631, s'était coincé un noyau de prune en travers du gosier en mangeant de grosses prunes, allant de mal en pis au bout d'une demie-heure. Et les miracles du glorieux Saint-Antoine nous précisent que sa mère à genoux implora Saint-Antoine lequel, aussitôt, fit régurgiter ce noyau de prunes au gamin glouton. Ainsi connaît-on une date assez précise pour la naissance de ce brave signataire du constat des dommages provoqués par la grêle aux Abrets en Dauphiné.


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